“Personne d’autre” : le bouleversant cri d’amour d’Aurélie Saada
©Bertrand-Exertier
Daniel Benoin confie à l’artiste Aurélie Saada le monologue d’une femme quittée par son conjoint pour en épouser une autre, plus jeune. Dans un décor somptueusement décati, la comédienne est éblouissante de maîtrise et de puissance dramatique.
Naufrage
C’est l’histoire d’un naufrage, d’un abandon en haute mer, d’une survie sur un radeau. C’est l’histoire, on ne peut plus banale, d’une femme de quarante ans qui se retrouve un beau matin quittée par l’homme qu’elle aime, au motif qu’il va en épouser une autre plus jeune. Pourtant, sous la plume magistrale de Botho Strauss, la douleur de cette femme devient aussi sa force, son désastre une chance de se reconstruire. Le metteur en scène Daniel Benoin avait déjà adapté cette nouvelle pour la scène en 1991, et il a eu envie aujourd’hui de le faire revivre en l’offrant à une merveilleuse interprète, la chanteuse et réalisatrice Aurélie Saada, qui s’en empare royalement, comme un intense moment de vie.
Un voyage en eaux troubles

© Bertrand Exertier
Dans un très beau décor signé Virgile Koering et des lumières de Daniel Benoin, Aurélie Saada apparait, pieds nus, dans une nuisette blanche, comme une adolescente paumée, à la démarche déjà lourde d’une femme revenue de tout. Son cri d’amour est d’abord un cri de désespoir, un appel, un chant passionné à un homme avec lequel elle a vécu dix-sept années, et dont le portrait se dessine au crayon, au dessus du piano. Alors qu’il se marie aujourd’hui, elle décide de lui écrire et tourne autour du papier et de la table sur laquelle elle doit coucher ses mots. Mais les mots se mettent à danser, à se révolter, à rugir au son de sa colère, de sa rage, de sa passion. Les phrases qu’elle prononce le réinventent, en même temps qu’elles racontent leur amour passé. Aurélie Saada les prononce de manière directe, en modulant avec mille nuances son jeu, tour à tour désespérée ou violente, romantique ou lucide, toujours sincère.
Entre souvenirs et cauchemars

© Bertrand Exertier
L’espace de la maison se peuple de rêves et de cauchemars. “Tu es heureux, et aveugle, je suis malheureuse, et je vois.” Extra-lucide et rationnelle, l’actrice s’enveloppe d’un costume d’homme, avant de disparaître et de revenir moulée dans une robe rouge de star. Toujours digne, puissante et présente au monde, elle embarque le public, conquis, dans le plus beau des voyages : dans l’intimité de ses brisures et de ses rêves, dans le flux continu d’une reconstruction de soi et d’une liberté nouvelle. C’est magnifique.
Hélène Kuttner
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